Initialement destiné à fournir la table de Louis XIV, le Potager du Roi, à Versailles, perpétue une tradition d’excellence dans la culture fruitière et légumière.
Créé pour garnir la table royale, le jardin potager de Versailles (78) se devait d’être éblouissant. C’est toujours un site de production, et l’illustration magnifique d’une nature domestiquée.
Quand Louis XIV voulut un jardin pour son château
Il y a 350 ans, un monarque, qui envisage sa vie comme on écrit un rôle, bâtit le théâtre de son existence. Le public de Paris est incontrôlable, Louis XIV s’installe à la campagne. Tout est à faire. Pour concevoir palais et parc, il a convoqué les meilleurs. Les cultures vivrières ne font pas exception à cette exigence.
La petite histoire de Jean-Baptiste de La Quintinie, concepteur du Potager du Roi
Juriste de formation devenu précepteur, Jean-Baptiste de La Quintinie accompagne un élève en Italie quand la beauté des jardins le frappe.
Il revient décidé à s’occuper d’horticulture. Aussi curieux que doué, il est rapidement remarqué par le gratin qui lui commande, à Sceaux (92) ou à Rambouillet (78), des jardins potagers et fruitiers. En 1661, il a 35 ans et entre au service du surintendant des finances Nicolas Fouquet, à Vaux-le-Vicomte (77). Il retrouve là des créateurs nommés Le Nôtre, Le Vau, Le Brun.
BAP à Versailles : une expo à ne pas manquer jusqu'en juillet 2019
« Le Goût du paysage » est l'une des 6 expos de la Biennale d'architecture et de paysage, organisée par la Région jusqu'au 13 juillet 2019 à Versailles. Conçue par l’architecte, urbaniste et paysagiste Alexandre Chemetoff au Potager du Roi, cette expo invite les visiteurs à préserver, cultiver et partager les fruits de la terre. Elle met en scène des portraits de 25 paysans-producteurs d’Île-de-France. Infos pratiques
Lorsque le flamboyant Fouquet tombe en disgrâce, l’équipe au complet passe au service du Roi. Directeur des jardins fruitiers et potagers des Maisons Royales, Jean-Baptiste de La Quintinie créait un nouveau jardin sur l’ancien potager de Louis XIII, à Versailles.
Antoine Jacobsohn perpétue la tradition : « Un jardin potager donne à voir le travail… »
La statue de Jean-Baptiste de La Quintinie domine le carré potager. À son socle, Antoine Jacobsohn donne parfois rendez-vous aux visiteurs. Il est le responsable du potager du Roi. Agronome et historien de l’alimentation, il ne se considère pas lui-même comme un jardinier, plutôt comme « le coach ». « Les jardiniers, dit-il, c’est ceux qui sont dehors quand il pleut ». Une dizaine de permanents mettent la main à la terre pour entretenir plus de 9 ha.
« Un jardin potager donne à voir le travail, contrairement aux espaces verts qui visent le pittoresque ou l’imitation de la nature. Nous, on plante des piquets et on étend des filets parce que nous travaillons pour la récolte, la vente et la consommation. » Antoine Jacobsohn, responsable du potager du Roi, à Versailles (78).
Bienvenue chez les arbres du jardin Noisette
Dans le jardin Noisette Antoine Jacobsohn explique : « Je n’y suis pas allé depuis longtemps et j’ai quelque chose à voir. » Autrefois appelé « chambre », c’est un espace clos par de très hauts murs de pierre beurrée d’un enduit à la chaux. Il abrite un verger de pruniers et de cerisiers. Contre les parois, des collections. Les arbres appartiennent à la même espèce, mais sont tous de variétés différentes, et on les conduit ici en « cordon vertical ». Il s’agit d’observer le comportement des différentes races et, pour le jardinier, de tester sur elles son savoir-faire. En rang au centre, des arbres d’une même variété, en production. « On pratique sur le même principe pour tous les fruitiers », indique Antoine Jacobsohn.
Les meilleurs moments pour visiter le Potager du roi, sur les conseils d'Antoine Jacobsohn :
- En mai, jardin fragile.
- En juin-juillet, jardin musclé.
- En octobre : fruits et de légumes (100 variétés) sont proposés à la vente.
www.potager-du-roi.fr
Une attention de tous les instants pour préserver la biodiversité
Au jardin Noisette, il voulait regarder si les pruniers avaient bien noué. La nouaison est le moment où la fleur se transforme en fruit. La réussite en la matière tient à une bonne pollinisation. « Nous avons un problème d’abeilles », remarque-t-il songeur, en scrutant les branches.
Au Potager du Roi se rencontrent, en dépit de son riche passé et de son adresse prestigieuse, les problèmes auxquels sont confrontés tous les jardiniers du monde. Certains pêchers mènent une lutte inégale contre la cloque. Ici, on a proscrit les produits phytosanitaires. Plutôt que de désherber sans cesse, les allées sont engazonnées. Quantités de végétaux, insectes ou petits mammifères, jugés indésirables, sont aujourd’hui regardés avec bienveillance.
Le Potager du Roi : un jardin de tradition et de transmission
Qu’aurait pensé Jean-Baptiste de La Quintinie de ces évolutions ? Il ne serait pas trop déboussolé s’il revenait dans son jardin. On a abattu à la fin du XVIIIe quelques murs pour ventiler des coins humides et on a rectifié des terrasses. Mais les arbres sont régulièrement renouvelés et on conserve ici la pratique de la taille à l’ancienne avec plus de 60 formes fruitières. Quelque 450 variétés fruitières et 400 variétés légumières récentes et anciennes sont cultivées.
C’est aussi devenu un lieu de transmission du savoir. Les élèves de l’École nationale supérieure du paysage (Versailles), qui a la responsabilité du Potager du Roi, cultivent tous une parcelle. Leur programme ne prévoit pour ces travaux pratiques que quelques jours mais Antoine Jacobsohn estime que cela suffit pour montrer aux futurs paysagistes que la nature a ses fantaisies, et ne nous donne pas toujours ce qu’on avait prévu.
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