Comment la Région et Île-de-France Nature luttent contre les maladies des arbres

Les forêts franciliennes face au changement climatique

Depuis quelques temps néanmoins, le visage de ces poumons verts se transforme. Il est de plus en plus fréquent de tomber sur des panneaux annonçant des travaux forestiers ou même de voir sa balade champêtre contrariée par des bruits d’engins de coupe et des scènes d'abattages impressionnantes. Le problème est également fréquent en lisière de forêt et proche d'infrastructures (routes, parking, réseau électrique...)

La raison ? Les arbres de la région francilienne qui sont de plus en plus affaiblis par les conséquences du changement climatique, par des périodes de sécheresses à répétition et par des maladies causées majoritairement par des attaques de champignons. Des maladies incurables et contagieuses pour les arbres à proximité qui fragilisent l'ensemble des arbres des forêts présentant un risque grandissant pour les promeneurs.

Quel est l’état actuel des forêts et espaces boisés en Île-de-France ?

Loïc Eon : Sur les 15.000 hectares gérés par Île-de-France Nature pour le compte de la Région, 11.000 hectares sont des espaces forestiers. Cela représente 40 forêts régionales, principalement situées dans la ceinture verte, un espace situé entre 10 et 30 km du centre de Paris. Depuis quelques années, sur le terrain on se rend bien compte que, avec les conditions climatiques qui changent et les périodes sèches qui s’accumulent et qui s’allongent, il y a un impact très fort sur les forêts : de plus en plus d’arbres ne résistent pas, ou plus du tout, aux maladies. C’est le cas notamment du frêne, menacé par la chalarose, du châtaignier avec la maladie du chancre et de l’encre, et de l’érable touché par la maladie de la suie.

Des maladies causées par des champignons qui rongent l’arbre et qui se propagent sur ceux situés aux alentours. Si ces maladies ont toujours existé chez les arbres, ces derniers y sont désormais beaucoup plus sensibles pour les raisons que l’on a évoquées. Auparavant, ces maladies concernaient quelques individus, mais aujourd'hui,  des parcelles entières peuvent être frappées. 

Comment cela se traduit-il sur le terrain ?

L. E. : Île-de-France Nature et les autres experts forestiers identifient de plus en plus d’arbres fragilisés, malades et cela sur des surfaces plus importantes qu'avant. Il faut savoir que les arbres savent résister, s’ils sont en bonne santé. Mais les conditions climatiques plus extrêmes auxquelles ils sont confrontés actuellement, en particulier lors des périodes estivales : le manque ou le surplus d’eau, le vent, les longues périodes de sécheresse, etc., les rendent vulnérables. La difficulté, c’est qu’il y a autant de cas de figure que de situations. Ces maladies, toutes provoquées par des champignons, peuvent aussi bien attaquer le feuillage des branches que les racines de l’arbre. Dans le premier cas, les signes de dépérissement sont visibles à l’œil nu. Dans l’autre cas, lorsque seul le système racinaire est touché, il est quasiment impossible de déceler la maladie. On rencontre ce problème sur l’ensemble d’une forêt mais il est encore plus préoccupant aux abords de chemins, et également  en bordure de route et parfois proche des habitations ou des équipements. 

Peut-on guérir un arbre malade ? 

L. E. : Malheureusement, à ce jour, on ne peut pas guérir les arbres atteints de ces maladies. L’un des moyens de les contenir est éventuellement d’introduire de nouvelles essences d'arbres dans nos forêts, se développant habituellement plus au sud du pays, plus résistantes et moins sujettes aux maladies connues aujourd’hui. Nous programmons par exemple de planter des chênes verts en forêt régionale de Verneuil (Yvelines). Une autre alternative est de sélectionner des essences déjà existantes dans nos forêts et plus résistantes aux sécheresses d’été et aux engorgements d’hiver : en forêt régionale de Ferrières (Seine-et-Marne), le chêne sessile sera ainsi préféré au chêne pédonculé. Mais au-delà de ça, on n’a pas d’autre choix que d’abattre l’arbre pour préserver ceux qui sont en bonne santé, éviter de propager la maladie et garantir la sécurité des promeneurs.

Par ailleurs, Île-de-France Nature a mis en place un réseau de placettes permanentes. Ces placettes correspondent à une surface délimitée et localisée avec précision, dans laquelle des inventaires de végétation sont effectués plusieurs fois durant une période. Elles permettront, à terme, de dresser un état des lieux de la forêt à des pas de temps différents : viabilité de la régénération, croissance, taux de mortalité, essences plus ou moins touchées pars les aléas climatiques, progression des maladies, etc. On réalise également des expérimentations permettant d’identifier des essences adaptées aux conditions actuelles et à venir, mais cela prend de nombreuses années avant d’observer les premiers résultats et d’arriver à des conclusions fiables. C’est dans ce cadre, que la Région Île-de-France, Île-de-France Nature et l’Office national des forêts ont signé une convention de partenariat dédiée à ce sujet. 

Il faut comprendre que lorsque l’on intervient, l’arbre atteint est déjà mort. Nous avons conscience que ces coupes d'ampleur suscitent l'émoi et de vives réactions. Mais ces interventions sont essentielles pour garantir la sécurité de tous. À plus long terme, il faut également viser à maintenir les forêts régionales ouvertes au public et permettre leur régénération naturelle. Depuis près de 50 ans maintenant, Île-de-France Nature poursuit 3 missions principales : maintenir l’ouverture des forêts au public, le maintien de la biodiversité, et le renouvellement des forêts. L’Agence participe à l’élaboration de plusieurs dispositifs régionaux en matière de protection environnementale et à leur mise en œuvre à l’échelle locale.