Des églises catholiques aux temples protestants, en passant par les mosquées et les temples bouddhistes, le patrimoine religieux francilien du XXème siècle est d’une grande richesse. Antoine Le Bas, conservateur en chef du patrimoine, présente cette diversité architecturale des lieux de culte dans l’ouvrage « L’Île-de-France, un autre patrimoine ».
L’ouvrage "L'Île-de-France, un autre patrimoine" s'appuie sur 40 années de recherche à l'inventaire général, et invite à découvrir ou redécouvrir les mille et une facettes du patrimoine francilien : ses églises gothiques et ses châteaux Grand Siècle, mais aussi ses aérogares, ses stades, ses cités-jardins et ses villes nouvelles, en passant par ses paysages de bord de Seine ou ses villages de caractère, qui ont inspiré les grands peintres du XIXe siècle. Découvrez tous les mois un extrait de chaque thématique abordée dans l’ouvrage.
Le patrimoine religieux du XXème siècle
Au début du XXème siècle, le patrimoine religieux francilien se compose surtout d’églises catholiques mais compte aussi quelques temples protestants ainsi que des synagogues. La loi de Séparation des Églises et de l’État (1905) affecte, à des degrés divers, la construction de ces lieux de culte, comme elle concernera plus tard celle des mosquées. La construction des églises, dans la première moitié du siècle, répond à l’essor du peuplement de la banlieue parisienne par un maillage serré de paroisses nouvelles créées dans un milieu déchristianisé, ébranlé par les crises économiques et sociales. À l’initiative de curés bâtisseurs, ces projets financés sur fonds privés (« Chantiers du Cardinal ») sont l’œuvre d’une génération d’architectes revisitant les sources de l’architecture chrétienne (byzantine, romane, régionale). Alors que l’emploi croissant du béton affecte encore peu les formes architecturales, des artistes engagés, regroupés en ateliers, adaptent l’art religieux au renouveau des Arts décoratifs.
À l’époque des « Trente Glorieuses », un clergé missionnaire, anticipant les réformes du concile Vatican II, élève au sein des « grands ensembles » de modestes chapelles économiques et convertibles au gré des besoins. Enfin, une fois surmontée la crise de la décennie 1965-1975, de nouveaux chantiers s’ouvrent sous l’impulsion du cardinal Lustiger. Par l’originalité des partis adoptés, des architectes reconnus (R. Piano, M. Novarina, M. Botta, F. Hammoutène, P. Faloci...) assurent à l’Église une présence visible dans la région capitale.
La construction des synagogues franciliennes, d’abord fortement inspirée de modèles historiques – notamment byzantins, comme rue Chasseloup-Laubat, Paris XVème, ou à Boulogne-Billancourt – s’ouvre à l’« Art nouveau » sous le crayon de Guimard (synagogue de la rue Pavée à Paris, 1914), puis à l’esthétique moderniste que G. Debré adopte par exemple à Belleville en 1930, pour édifier un centre communautaire alliant lieu de culte, école et salles de réunion. Comme l’illustre le centre communautaire Ohel-Yossef de Pantin, la tendance actuelle incline vers une architecture résolument moderne, exprimant à la fois l’élan spirituel et la symbolique d’une lumière intérieure.
La réalisation de la grande mosquée de Paris en 1926, en hommage aux nombreux musulmans morts pour la France au cours de la Grande Guerre, constitue un chef-d’œuvre d’architecture islamique, longtemps resté sans lendemain. Élément majeur d’un institut musulman comprenant également une bibliothèque et une salle de conférences, la mosquée déploie un parti conforme aux grands principes de l’architecture islamique tant par son opacité extérieure que par son programme complet et son parement intérieur de mosaïques. La plupart des mosquées franciliennes érigées à la fin du siècle (Évry, 1994) reprennent aussi bien ce programme complexe qu’une austère monumentalité externe, réservant aux espaces intérieurs un décor plus traditionnel.
La multiplicité des populations qui fait de l’Île-de-France une véritable mosaïque culturelle constitue ainsi, tout au long du siècle dernier et encore au XXIème siècle, un terreau fertile pour l’innovation architecturale en matière de lieux de culte : églises chrétiennes de différents rites, synagogues, mosquées, pagodes bouddhistes...
Île-de-France : Un autre patrimoine - Unfamiliar Heritage
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