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Villégiature Sur la commune de Créteil s’élève le château des Mèches, datant du XVIIe siècle et reconstruit au XIXe siècle. Haute bâtisse aux lignes blanches, il évoque les villas surplombant les lacs italiens. La publication « Châteaux, villas et folies. Villégiature en Île-de-France » (éditions Lieux Dits) présente son histoire et son architecture.

Le promeneur qui arpente le parc Dupeyroux peut un instant se trouver transporté sur les bords des lacs italiens en découvrant la silhouette élégante du château des Mèches, noyé aujourd’hui dans l’urbanisation.  

Il date de l’époque où Créteil était un bourg de 2 500 habitants, construit sur un coteau de la Marne. Là, sur les marges orientales de la commune, se trouvait un château du XVIIe siècle appartenant au comte Pajol, qui le vend en 1845 à Edmond-Michel Nompar de Caumont, marquis de La Force, issu d’une grande famille aristocratique.

Il a épousé un an auparavant une riche veuve anglaise, Charlotte Georgina Smythe. Le couple habite 25, rue Neuve-du-Luxembourg, actuelle rue Cambon à Paris, mais rapidement le besoin d’avoir une villégiature se fait sentir, d’où l’achat de la propriété des Mèches.  

Château des Mèches, Créteil (94) - Crédit photo : © Stéphane Asseline, Région Île-de-France
Château des Mèches, Créteil (94) - Crédit photo : © Stéphane Asseline, Région Île-de-France
Château des Mèches, Créteil (94) - Crédit photo : © Stéphane Asseline, Région Île-de-France
Château des Mèches, Créteil (94) - Crédit photo : © Stéphane Asseline, Région Île-de-France
Château des Mèches, Créteil (94) - Crédit photo : © Stéphane Asseline, Région Île-de-France
Château des Mèches, Créteil (94) - Crédit photo : © Stéphane Asseline, Région Île-de-France

Selon l’acte de vente, la propriété comporte un parc d’un peu plus de 6 hectares. Des premiers travaux sont réalisés, notamment à l’extérieur avec l’installation du portail d’entrée aux armes du marquis (d’azur à trois léopards d’or) et de la marquise (de sable à trois roses d’argent placées deux et un), et le jardin est réaménagé. Cette famille prestigieuse s’insère rapidement dans la société locale et le marquis est élu maire dès 1846 et le reste jusqu’à sa mort en 1857. Entre-temps, la mort de son père en 1851 lui avait permis d’hériter du titre de duc. 

Le goût de la villégiature s’étant accru chez les Parisiens en même temps que les moyens de locomotion devenaient plus pratiques et que les chemins de fer rapprochaient les distances, le charmant coteau qui domine la Marne commença à se couvrir de maisons de campagne, tandis que le versant sur la vallée de la Seine demeurait et est resté le domaine de la culture.

La duchesse, devenue veuve, fait reconstruire le château en 1865. La belle maison de plaisance qu’elle fait ériger est directement inspirée de villas italiennes. Son volume parallélépipédique, sa blancheur, son toit à faible pente en léger débord et surtout la double loggia de la façade ouest, tournée vers le jardin, lui confèrent cet air de villa des bords des lacs italiens. Le dernier niveau est un étage-attique qui termine avec élégance l’élévation où le toit est complètement effacé.  

La disposition intérieure révèle aussi le goût italien : le vestibule à la française est abandonné au profit d’une longue galerie voûtée, ornée de pilastres ioniques, qui s’étend d’un bout à l’autre du bâtiment. D’un côté, au nord monte l’escalier entre-murs sans décor, dans la pure tradition italienne, et au sud la galerie offre la vue d’une belle allée de tilleuls à laquelle on peut accéder par une porte-fenêtre et un escalier extérieur.

Le grand salon s’ouvre par trois baies sur la loggia qui a été depuis vitrée et transformée en jardin d’hiver. Le plafond est orné d’une vaste peinture murale en trompe-l’œil sur toile marouflée. Bordée d’une fausse balustrade avec draperies, elle s’ouvre sur le ciel peuplé de figures mythologiques. De part et d’autre, du côté de la cuisine – qui est une adjonction du XXe siècle, celle d’origine étant au sous-sol – se trouve une grande salle à manger et son office et de l’autre un petit salon de style rocaille. En face, l’actuelle petite salle à manger servait de bureau à l’origine. Il y avait une salle de billard à l’étage.

Le choix d’un italianisme affiché peut avoir deux origines. D’une part la nationalité britannique de la duchesse, l’Angleterre ayant été la première à adopter le modèle palladien grâce à l’architecte Inigo Jones au début du XVIIe siècle. D’autre part, on sait qu’en 1862 Georgina Smythe a effectué un voyage en Lombardie chez ses amis le comte Hercule Oldofredi Tadini et la comtesse Maria Terzi, et qu’un mariage fut conclu entre leurs enfants, Elisabetta et Walter, officier de la marine royale anglaise. Ce ne serait pas la première fois qu’un voyage aurait inspiré un choix architectural.

C’est William, le fils aîné, qui hérite du château à la mort de sa mère en 1867. Mais il le vend rapidement et les propriétaires, dont l’archidiocèse de Paris, se succèdent jusqu’à ce que le docteur Dupeyroux achète, en 1908, ce qui reste de la propriété (3 hectares), en partie lotie. Devenue en 1967 le siège de la préfecture du Val-de-Marne, en attendant la construction du bâtiment actuel inauguré en 1971, elle est aujourd’hui la résidence des préfets du Val-de-Marne. 

Texte : Roselyne Bussière

« Châteaux, villas et folies. Villégiature en Île-de-France » 

Crédit photo : © Région Île-de-France/Lieux-dits

Cet ouvrage, où l’on croise Bellanger, Guimard, Mallet-Stevens, s’appuie sur un corpus de 1 700 maisons, du XVIIIe au XXe siècles. Découvrez un florilège inédit de maisons de plaisance franciliennes.

« De tous les Français, le bourgeois de Paris est le plus champêtre », nous dit en 1841 L’Encyclopédie morale du XIXe siècle. La quête de bon air, dans une capitale densément peuplée, conduit les Parisiens de toutes conditions à se construire des maisons dans la campagne alentour dès le XVIe siècle, imitant la pratique aristocratique d’un partage de l’année entre saison mondaine en ville et beaux jours au vert.

Du château de Champs-sur-Marne (77) au Désert de Retz (78), de la maison Caillebotte à Yerres (91) à la villa Savoye de Poissy (78), du chalet au cabanon, en passant par tous les styles architecturaux, l’Île-de-France s’est couverte de maisons de villégiature, non seulement autour de ses sites les plus enchanteurs, boucles de la Seine, bords de Marne, forêts de Saint-Germain ou de Fontainebleau, mais finalement partout où il était possible de trouver belle vue et bonne compagnie.

Cet ouvrage présente un territoire inattendu en matière de villégiature, l’Île-de-France, dont la richesse des paysages et la fantaisie des architectures estivales n’ont rien à envier à Trouville ou à la Riviera. La banlieue elle-même apparaît sous un jour nouveau, comme l’ultime avatar de havres de paix campagnards et populaires.

Éditions Lieux dits, collection « Patrimoines d'Île-de-France », 256 pages, 300 illustrations, 32 euros.

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